Compte de fées : roots

Le métro est Lillois.
Le son d'accordéon provient des doigts d'un enfant.
Le petit accordéon contraste violemment avec les petites mains effritées et sales, avec la désinvolture des oreilles bouchées et des têtes plongées dans les quelques pages d'un quotidien gratuit.
Les centimes d'euros ne font pas un bruit fier; ils jouent une musique honteuse en heurtant le sol d'un métro à la pointe de la technologie.
L'africain, plus communément appelé par sa couleur de peau, tient une énorme tablette de bonheur cuisiné avec du cacao, du lait et des amandes bien joliment arrangés au coeur de ce mélange pétrifié.
L'enfant passe.
D'un geste simple, bref et rapide, le bonheur détenu par l'africain rejoint les mains sales de l'enfant.
Large sourir.
Larges sourirs.
Je dirais même des soupirs, soulagés de cette action qui arrose la conscience de tout le monde.
"C'est mille fois mieux que des sous" dit l'arabe, plus communément appelé maghrébin.
"ah oui, c'est sur." rétorqua l'auteur de l'acte.
Ma voisine pour un trajet, une française, plus communément appelée citoyenne, dégage une énergie soudaine! elle admire!
Son voisin à elle, lui, continue à vider sa tête dans la proposition de coalition formulée par une ex candidate à la présidentielle.
L'enfant, garde un sourir poignardant : personne n'ose plus détourner son regard de cette explosion de bonheur, et je n'exagère pas.
L'enfant est redevenu, en l'espace de quelques secondes, un enfant.
Hommage à tout homme/femme qui garde encore le sens de la mesure et des proportions de son bonheur par rapport à celui d'autrui.
Hommage aux utopies motrices qui nourriront les espoirs d'un monde moins atroce.
Hommage à l'africain.

ps : aucun animal n'a été maltraité pendant la narration de ces faits.